31 mars 2009

Il y aurait dû... Ou comment on en arrive à Ivry Gitlis

Il y aurait dû avoir les mots d'un jeune homme ce soir à la place de ceux-là...

Et moi j'aurais pu aller me coucher sans avoir à passer par là.

Du coup, je ne résiste pas à vous faire partager ce petit film... il y a quelques moments vraiment beaux. Pas au tout début, mais assez vite finalement.

Ce grand monsieur : Ivry Gitlis qui disait "Vivre, c'est travailler"... et qui, dans tout ce qu'il a fait, avait cette simplicité et cette humilité, cette générosité fait ici, jouer des enfants. Et effectivement, c'est "mieux que Boulez" (si, si vous verrez ;-) et vous savez combien j'abhorre la démagogie ! ) Un film qui peut faire du bien à certains musiciens...

Le plaisir, le plaisir et le partage, mesdames et messieurs !

Bon visionnage !

30 mars 2009

29 mars 2009... La Plume de l'Ange

Présents : Alexandre, Antoine-Baptiste et Fleur.... (et Rose... et en plus on met les filles en premier quand on est bien élevé... soit : Fleur, Rose, Antoine-Baptiste et Alexandre - NDLR)

Après s’être assoupie la veille au soir devant un film muet très inspirant d’Ozu Yazujirô, "Histoire d’Herbes Flottantes", relatant les aventures d’une troupe japonaise itinérante, le reste de notre petite troupe se réveille en douceur, profitant d’une grasse matinée accordée par Alexandre.

Gaël et Jane s’en vont (Ils nous abandonnennnnnnt, oui ! ;-)NDLR) sous un ciel grisonnant, tandis que nous nous rendons, accompagnés de Rose, au Studio du Soleil. Notre petit nombre ne nous permettant pas de travailler une nouvelle scène de "Dom Juan", Alexandre a décidé de faire travailler Antoine sur sa proposition pour l’épreuve de théâtre du baccalauréat (qui approche à grands pas).

J’apprends que le texte choisi est de Claude Nougaro, "La plume de l’Ange", mais Alexandre me retient expressément lorsque je m’apprête à en lire les premières lignes, me rappelant qu’il sera plus agréable de le découvrir lors de la prestation d’Antoine. Celui-ci s’applique justement à se détendre et à se relaxer en effectuant quelques mouvements au préalable. Notre metteur en scène en fait autant afin d’être à l’écoute de l’apprenti acteur qui va tenter de nous faire voyager au « pays du trop ».

Antoine doit jouer un homme devenu fou, qui s’adresse à un lampadaire dans un asile psychiatrique, persuadé que ce dernier est un être humain en chair et en os. Son but est de parvenir à lui raconter sa rencontre avec un ange, qui après lui avoir donné une de ses plumes, a prétendu qu’il suffirait qu’un homme croie en la véracité de cette histoire pour que ce « monde malheureux » se transforme en un « monde de joie ». Antoine s’avance sur scène pour un premier essai, s’en suit un deuxième, puis un troisième, mais ça ne prend pas. Il semble y croire, mais décroche soudainement des visions qu’il veut nous faire partager, laissant place à l’acteur qui se dévoile en même temps qu’il dévoile son texte. La magie du lien entre le spectateur et celui qui joue disparaît. Antoine en a conscience, mais continue cependant d’écouter son intellect (avec peut-être d’autres préoccupations en tête) alors qu’il devrait se recentrer, et simplement écouter le va et viens de son souffle, afin de laisser le personnage s’emparer de lui, le guider.

Nous décidons de faire une pause. Alexandre propose à Antoine, qui se montre plutôt récalcitrant, de jouer la scène. Ce qu’il fait, après s’être muni d’un bout de costume et d’une plume en papier, afin d’appuyer concrètement son personnage.

Il joue. Antoine et moi observons, et nous laissons transporter.

Un ange apparaît, une rue, une petite fille, un vieux noyer féru de métaphysique… La magie opère.

Finalement, nous descendons délicatement de cet espace-temps indescriptible (sinon que c’est « trop » ☺) et faisons chacun part de nos impressions. Alexandre nous fait part de ses sensations d’acteur, les endroits qu’il a vraiment vu et les autres (parce que lui aussi à « ses autres » moments. Si. Si. NDLR) Son expérience en la matière se sent, et il était étonnant pour nous de le voir jouer pour la première fois. Cependant, Antoine glisse que la prestation l’a inspiré, mais qu’il voit les choses se dérouler autrement.

Nous sortons profiter d’une bouffée d’air frais (et humide… il pleut), et terminons par un petit débat traitant de l’humilité, de l’enrichissement personnel intérieur que peut apporter le théâtre lorsqu’on « trop trop joue », et du plaisir de se laisser « guider » nécessaire à cette pratique.

Conclusion : soyons d’éternels élèves, la vie est un véritable apprentissage, et apprenons à écouter notre cœur d’enfant. ;-)

Il est tard, faites de beaux rêves aventureux, en or, en argent, de toutes les couleurs.

Fleur.

29 mars 2009

Séance du Samedi 28 mars 2009

Présents : Fleur, Aude, Jeanne, Gaël et Céline

Samedi pluvieux, mariage heureux pour les uns et répétition active pour les autres.
Après un petit dej, une passagère récupérée sur le bord de la route et une petite fleur au pied de notre soleil (le Studio du Soleil - NDLR ) nous pouvons débuter la séance.

Le soleil n’a toujours pas pointé son nez, mais les lumières le remplaceront rapidement. Pour commencer cette journée comme il se doit pour notre petite troupe en construction, il nous faut nous maquiller. Pas facile pour tout le monde, mais nous avons eu une grande surprise (la moche tu nous avais caché ça, tu es déjà une pro du maquillage). Donc, pendant que certains se transforment en jeune ou vieil homme, d’autres font comme ils peuvent et arrivent au mieux à ressembler à une espèce de chat. Mais ne perdons pas espoir, le maquillage s’apprend, cela viendra petit à petit, enfin nous l’espérons.

Avant toute chose, il faut savoir respecter des règles qui sont comme « le code de la route » du théâtre (moi, je dirai du comédien ;-)- NDLR) :

1. Savoir qui nous jouons. D’où il vient, l’âge, les qualités physiques, le métier, les passions…

2. Savoir d’où il vient et où il va.

3. Choisir en fonction, l’état dans lequel il est. (énervé, fatigué…)

4. Avoir un projet, un objectif : ce qui le pousse à venir sur scène, ce qu’il vient y faire.

5. Y croire et le laisser exister vraiment, dès le premier instant (avant de faire l’acte d’entrer en scène) en écoutant. Son personnage, son état, le lieu dans lequel on entre, son partenaire, son texte, les accidents. Tout, tout, tout, tout ! NDLR

Une fois la transformation « achevée », il est temps d’aller déjeuner, repas gastronomique (pâtes, fromage et gâteau à la pomme).

14 heures, il faut y retourner, la troupe doit maintenant s’habiller avec les précieux costumes (prêtés par le Théâtre du Soleil - NDLR). Nous sommes prêts à commencer le travail. Première étape importante, l’acte 1 et, plus précisément, la scène 1 de l’acte 1. Tour à tour, la petite troupe incarne les personnages de Sganarelle et Guzman.

Aude et Jeanne filent sur scène, l’éloge du tabac se transforme en véritable supplice pour Sganarelle tandis que Guzman fait une arrivée fracassante, pris de panique . Attention, il ne faut pas oublier que nous (La mauvaise petite troupe de Nô qui joue "Dom Juan" - NDLR) nous présentons devant l’empereur et ses samouraïs, ce n’est pas le moment de craquer, le pauvre petit acteur se sent dépassé, il sombre… Pas question de faire mauvaise figure devant l’empereur, c’est à Sganarelle de reprendre les rênes.

Reprenons à nouveau cette scène, mais cette fois Fleur sera Guzman et je serai Sganarelle. « Tu devrais peut-être essayer d’être Don Elvire déguisée en valet. » Voilà, la tonalité est prise, entre les pleurs d’une femme désespérée et un Guzman désemparé.

Gaël monte à son tour sur scène, mais le temps est limité, il nous faut être rentré avant 18h au mas (Ils vont tous au Théâtre ce soir-là, sauf Gaël – NDLR). Vite, vite ! « NON ! J’ai perdu ma bague derrière le chauffage ». Trop tard, nous sommes en retard… C’est bon, nous y sommes, mais ce n’est pas fini, il faut maintenant partir sur Aix.

Allez au revoir à Mercredi….

Céline.

28 mars 2009

Le temps...


Hier soir, les "jeunes" ont commencé à arriver pour notre premier week-end "Dom Juan". La maison, comme elle sait si bien le faire, a commencé à vibrer de cette vibration si particulière. Elle a rempli ses poumons vieux de cent cinquante ans de ces rires, ces mots dits un peu trop forts (quand on est nombreux, avez-vous déjà remarqué comment la voix sort de sa cachette et comme quand on retourne au silence, les oreilles sifflent ?;-)), de ces destins à peine entamés, de ces histoires de passage. Elle n'a pas peur de cela. Elle a ces murs épais qui protègent, l'été, de la chaleur étouffante et l'hiver, du froid (enfin presque... si, si). Elle a vu, entendu, reçu tant de choses... elle ne va pas "s'émouvoir pour si peu ! "alors encore une fois elle remplit ses poumons. Elle aspire la musique qui se joue, les sourires qui se donnent. Elle accueille même ceux qui veulent le silence et a tranquillité. Elle a la place.Et elle souffle, doucement, de ce souffle imperceptible que certains d'entre nous savent pressentir, mais qui ne se donne pas pour ça. Elle souffle tout cela au centuple. Sans compter. Sans s'inquiéter de ce qui lui restera. Elle souffle ce petit souffle centenaire qu'elle a toujours soufflé. Juste ça ! Juste là ! et les rires qui tintaient dans la cuisine arrivent au pied de la cheminée et vous poussent à ne pas relâcher l'attention.

C'est qu'hier, en plus de cette arrivée, en plus de ces amis, ces partenaires, il y avait au Mas, une réunion. En petit commité, avec Laura et Elise. Laura est la nouvelle administratrice de la Compagnie et de ce lieu de théâtre en gestation qui verra le jour bientôt (promis dans le courant de la semaine, je vous en parle). Et devant nos ordinateurs, sous le regard d'Hannya qui maintenant m'accompagne tous les jours, nous avons continué à dessiner ce rêve jusqu'à une heure avancée. Insistant sur les zones d'ombres, les flous artistiques. Pour que cette maison qui nous a accueilli puisse voir le jour ailleurs, en plus grand (et oui 1000 personnes dans la maison tous les soirs, ça, elle ne le supporterait pas ! ).

Et en discutant, en cherchant comment expliquer dehors, ce qui, pour nous, dedans, semble si évident, il a fallu chercher des mots, encore des mots. Les plus justes, les plus simples. Et ce n'est pas une tâche aisée. Mais dieu que c'est intéressant et riche... et c'est dans l'épuisement de cette noble tâche que m'est apparu le mot fondamental, celui pour lequel je me bats depuis que j'ai rencontré le Théâtre du Soleil, celui que j'ai même sûrement rencontré avant cela, quand j'étais un élève de cette alternative à l'école : "La Maison des Enfants" (tiens, il faudra que je la rajoute à mon Arbre, celle là !) et que je tiens à défendre dans chaque acte, à porter dans chaque pas, à laisser vivre dans chaque moment : LE TEMPS !

Oui, le temps. Prendre le temps. Avoir du temps. Se donner le temps. Le temps vrai de la maturation. Le temps juste et nécessaire qui permet à l'homme de comprendre que son temps à lui ne dure qu'une seconde dans la valse du temps universel, dans l'échelle temporelle de l'humanité. Comment le mesurer si l'on ne décélère pas de temps en temps ? Avez-vous déjà vu le champ de vision de l'homme lancé dans un véhicule à 180 km/h (je vais vous chercher une image... sinon, on trouve ce schéma dans le "Code de la Route") ? Il devient dramatiquement étroit. Et si, c'est normal et nécessaire parfois, il faut savoir ramener les machines au ralenti. Pour regarder les fleurs s'épanouir. Pour contempler les étoiles. Même si l'on doit se forcer, s'obliger. Pour essayer de reprendre la mesure du temps.

Bon... la le temps file trop vite et nous allons devoir partir en répétitions. Nous en reparlerons maintenant que j'ai retrouvé le mot... (merci Maman !;-)) Mais là, il est temps pour moi de me préparer. De me mettre au diapason de cette équipe et de ce voyage que nous nous apprétons à faire au côté de "Dom Juan" et de son valet "Sganarelle". Ils viendront vous en parler ce soir.

Belle journée à vous. Et essayez, essayez de prendre quelques minutes à votre train. Pour sentir, ressentir... vivre ! Grandir ! Aimer...

A vite ! ;-)

27 mars 2009

« Un cœur honnête peut faire fleurir une pierre »

« Un cœur honnête peut faire fleurir une pierre »

- Qu’est-ce que tu dis papa ! Une pierre, ça ne fleurit pas !

Une pierre, ça ne fleurit pas.
Non, on peut l’imaginer… On peut, à l’aide d’un pinceau et de quelques couleurs la dessiner cette fleur ! On peut la faire éclore avec des mots choisis, cherchés, traversés. Ou bien la raconter. Pourvu que tu y crois. Pourvu que moi j’y crois. Je veux y croire ! Je dois y croire ! C’est là le seul devoir de mon métier…

Bien sûr, ce n’est pas le chemin de chacun. Heureusement. Parce qu’il est plus important d’avoir un bol de soupe dans son assiette le soir qu’une pierre fleurie. Parce qu’un mot ne remplacera jamais un lit, ni le chauffage, ni l’eau, ni les morts, ni la folie, ni la violence.

Je me souviens. C’était en 2003. Premier incident pour notre statut d’intermittent. Il fallait travailler 507 heures en dix mois et demi à la place de douze ! J’étais outré, je voulais me battre et faire entendre au monde la nécessité de nous sauver. J’étais plus jeune… J’avais oublié que notre ministère de la Culture n’avait que 50 ans…

Je me souviens d’un homme, un bel homme qui flânait dans les rues de Salon-de-Provence, ce fameux samedi. Je lui avais sauté dessus, l’agressant presque pour qu’il signe une pétition, sûr de ce que j’avançais. Je me souviens son regard et ses mâchoires qui, d’un coup se crispèrent. Lui, l’ouvrier, lui qui travaillait huit heures par jour à faire tourner des boulons et qui finissait le mois avec sept cent euros sous le regard en biais de ses enfants qui n’osaient pas dire à leurs copains le métier de papa ; lui, il fallait que, pour son seul jour de repos, au bras de sa femme, en cette belle journée de printemps, il supporte mon petit problème comme si c’était le sien ?! Comme j’ai eu honte quand j’ai compris ce que ses yeux me disaient ! Vraiment honte. De m’être laissé égaré à ce point. D’avoir oublié que ni Shakespeare, ni Molière n’avait eu autant que je n’avais jamais eu et que jamais, non, jamais cela ne les avait empêchés d’œuvrer. Avec patience, humilité et ferveur.

Alors, j’ai laissé à ceux qui étaient convaincus le soin de continuer la lutte et je suis retourné m’enfermer dans ma chambre noire. J’ai œuvré et œuvré pour comprendre pourquoi nous avions perdu le chemin. N’avions-nous pas été de tout temps des parias, des même pas humains ? Nous qui vivions d’aumône et de la bonté de grands hommes riches et généreux qui s’amusaient de notre capacité à nous courber bien bas devant eux.

On ne porte pas ce que l’on porte pour être au devant de la scène. Cela est le résultat d’une belle et juste initiative qui, comme toutes avant elle, a été salie à la première heure, avant de dégénérer. Tuant des artistes par millier. Les mettant au même endroit que les autres ! Ce n’est pas que les autres soient mauvais ou bêtes. Non ! Mais garder son cœur ouvert pour tout ceux qui ne le peuvent pas est un travail de chaque instant et qui ne supporte aucun détour ! Nous devons apprendre à manger des cailloux accommodés d’un peu d’eau de rivière et supporter le goût des chairs sanglantes au fond de la gorge sans crier, sinon comment mesurer le prix qu’ils payent, eux, qui font tourner le monde ?

Bien sûr, nous sommes nécessaires. Bien sûr, ils ont besoin de nous. De ces instants où ils peuvent s’extraire de la chaîne du monde pour se retrouver, enfants oubliés. Ils ne demandent que ça : de pouvoir confier à des gardiens leur cœur d’enfant. Qu’ils puissent à l’aube de leur quatre-vingt ans le retrouver, ce précieux qu’ils ont été obligé de lâcher en route pour survivre.

Ils brûlent leur âme, ils brûlent leur amour, leur être tout entier pour nous nourrir et nous nous devrions juste jouir ?!.

Je vous en conjure. Pour tout ceux qui meurent chaque jour, revenons à nos places. Acceptons de payer le prix, nous aussi. Acceptons notre rôle. Parce que plus que jamais ils ont besoin de nous. Pas de moi, ni de toi, mais de ces gardiens de leur humanité. Et cela, nous sommes les seuls à pouvoir le porter. Pour eux, nous nous le devons.
A chaque guerre, à chaque mort, à chaque insulte qui fuse, nous, les artistes, nous devons accepter d’en porter la responsabilité plus qu’aucun autre.

Parce que si nous faisions notre travail, cela ne serait pas. Oui, ne serait pas. A-t-on déjà vu des gardiens jouer les stars, vouloir signer des autographes et se vanter d’avoir peint tout De Vinci ?

Je suis désolé de dire cela, vraiment. Mais si nous ne nous remettons pas en question, nous, qui le fera alors. Qui dans le monde le fera ?

Je pense à Rose qui ce soir a blessé une copine pour se joindre au groupe. A blesser son petit cœur pour se mettre avec les autres. Si moi, son père, je ne me bats pas pour qu’elle puisse le retrouver quand elle le voudra, moi, le soit disant artiste… qui dans le monde le fera ?

- Dis Papa, c’est vrai que « Un cœur honnête peut faire fleurir une pierre », pas vrai ?!

Bien sûr, mon amour… dès que tu voudras le voir, le croire, je te le montrerai. Je te le promets. Même si c’est dans cinquante ans ! ;-)

26 mars 2009

Compte rendu de mercredi 25. La séance fut courte mais nous n'étions pas pour autant des loutres.

Étaient présents : Aude, Gaël, Antoine, Jeanne, Alexandre.

"
Je prends tout,
Je trop trop joue.
Mangeuse de ce qu'ils donnent.
Ici on pense avec le ventre et je souris à l'intérieur comme d'habitude.
J'ai leurs vitaux sur le dos.
Parce que j'ai la possibilité d'être traversé par..."

Jeanne F.


Quoi de mieux après un début de semaine au vent froid
qu'un bon quart d'heure d'étirements et d'assouplissements en petit comité
sur une moquette grisâtre de poussière et de déchets scolaires ?
Pour "clore le début de séance", on enchaine sur quelques mouvements
d'aïkido, nécessaires pour se plonger dans l'univers japonais.
Deux par deux, nous sommes face à face et l'un tient les poignets de l'autre.
On renverse son partenaire dans un simple mouvement sûr et concentré pour qu'il se retrouve dos sur le sol.

Se servir de la force de ses doigts comme de la lame d'un sabre,
Et se repositionner dans la même énergie tout en gardant ce flux
dans l'esprit.

Difficile d'expliquer clairement le déroulement du mouvement.
Mais cet exercice est aussi utile pour finir de s'étirer dans cette forme de danse martial.

Au hasard d'un déplacement et de l'idée des techniques du théâtre Nô,
nous avons gouté, un fragment de seconde, à ce que doit être l'art de marcher sur cette Scène Ancestrale.

Ensuite, nous nous sommes mis en cercle et avons pris possession des livres qu'Alexandre avait mis à notre disposition. Ces livres se composaient principalement de grandes pages blanches où, sur la surface, une petite phrase poétique écrite en calligraphie japonaise s'étalait, avec traduction s'il vous plait :

Des Haiku de Buson, Issa et Bashô.

Chacun à son tour, après avoir pris le temps qu'il fallait pour retourner tous les mots dans sa tête, échapper à toute forme de pollution extérieure, à notre cocon, pour n'avoir que la mission divine de l'acteur à accomplir,

Celle-ci étant, cette fois-ci, d'illustrer corporellement et de façon claire et simple, ces petites phrases pleines de sens. Faire de notre corps un trait souple et léger tel celui d'un pinceau sur la feuille de riz.

La séance se termine déjà. Alexandre nous lit un extrait de la réécriture qu'il a faite du Dit Des Heike.

Et là, place au rêve et à l'imagination.

Et rien que l'énumération de ces nombreux noms japonais est un voyage.

Faute de temps, nous remettons à la semaine prochaine la suite : le récit sur scène de l'histoire du Sire de Kiso avec les mots improvisés et désordonnés de la mauvaise troupe de Nô que nous formons désormais.

La relativité du temps n'a pas joué en notre faveur. Ce fut court. Ce fut trop court. "

Antoine-Baptiste et Jeanne, le 25 mars 2009.

Epaules tendues et TGV

Les projets se multiplient, les axes s'élargissent, s'ouvrent... à l'infini. Et moi au milieu, je cherche dans un navire lancé à 320 km à l'heure à regarder autour, à garder l'oeil ouvert, généreux. Mais je n'y arrive pas ! Et ceux qui ont le malheur de croiser ma route dans le sens latéral se trouvent coupés en deux. Littéralement...

Que faire ?

Où sont les co-pilotes ?! Moi, j'ai mal aux épaules et le coeur déchiré. Il ne faut pas ralentir, je le sens bien. Mais j'ai besoin de pouvoir laisser le volant quelques instants. De respirer la corolle d'une fleur et de verser les larmes pour ceux perdus en route. De marcher un peu en regardant le ciel, de mettre un petit tas d'herbes en boule et de m'en faire un oreiller pour dormir quelques instants sous les étoiles du ciel.

Mais je ne peux pas. Et je sens bien que si je freine, si je pose la voiture au bord de la route, ce Théâtre de Grande Valeur, la machine ne repartira pas. Elle ne marche pas avec un moteur, non. Elle n'a pas d'organe autonome. Elle a atteint cette vitesse par les rencontres et par les rêves. Par le pouvoir du temps et l'instant. Et la tortue nous l'a bien montré : une fois partie, elle va jusqu'à la ligne d'arrivée. Sans se laisser détourner. Avec humilité, naïveté, ferveur. Mais elle y va !

Alors, je continue. Je me mets des baffes. Et quand la ligne est droite, j'essaye de me concentrer sur ma respiration pour détendre mes muscles tendus de fatigue, tendus de nerfs, tendus d'effroi. Je mets de la musique dans le poste et je chante à tue tête pour endormir les tensions, pour oublier la douleur de la perte et de la solitude.

Oh, vous ! Si vous savez entrer dans un véhicule lancé à 320 km à l'heure et que vous avez quelques instants à perdre ou à donner, n'hésitez pas, entrez ! J'ai tant besoin de vous.

Belle journée à vous.

Et à la prochaine étape...

Car quoi qu'il advienne, je mènerai mon TGV jusque là. Quoi qu'il advienne, quoi qu'il m'en coûte...

25 mars 2009

L'Expérience Japonaise... Nîmes


Petite parenthèse bien agréable.
Hier soir, nous sommes allés à l'ouverture de "l'Expérience Japonaise", Biennale de la jeune création japonaise à Nîmes. Au programme danse et musique (et oui, pas de théâtre...).

Après deux heures de route et une journée de préparatifs assez intense, nous voilà à l'Hôtel du Centre, un petit hôtel sans prétention, mais à l'accueil vraiment humain et chaleureux. On enfile fissa nos tenues de gala et nous voilà, déambulant aux côtés de monstres japonais (les monstres "Kaiju" de PicoPico) dans la vieille ville. Au milieu d'enfants, d'étudiants, de parents et de badauts, nous découvrons cette ville sous le rythme effréné et quelque peu strident de la musique actuelle japonaise. Après une petite heure de ballade sous grand vent, nous arrivons au théâtre.

Là, c'est un programme en deux parties. La première nous fait découvrir "Kentaro!!" un jeune danseur, chorégraphe de la mouvance Hip-Hop (on craint le pire !!!). Et nous voilà au Japon. Quelque chose se passe là sous nos yeux de vraiment moderne, mais liée aux racines si spécifiques de cette culture, liée aux dieux et aux démons shintôs qui nous entourent. Un beau miracle. Et une émotion que je n'avais pas senti en regardant de la danse depuis bien longtemps. Retenez bien ce nom et priez avec moi pour que le succès ne le détourne pas de sa voie. Lui qui vient saluer en seiza, la tête au sol et qui pleure de se voir acclamé. Quelle merveille !!!! ;-)

Après, nous avons eu droit à un groupe de musique 8bits, le groupe "YMCK", vous savez, la musique qui affublait nos premières consoles de jeu. C'est drôle, intéressant, mais l'absence de basses et d'aigus et la puissance des médiums m'obligent à sortir de la salle avant la fin du concert. Elise, elle, restera jusqu'au bout. Avec la banane, s'il vous plaît !

Nous retrouvons Mariko Oka Fukuroi, Mr Iwata (Vice Consul du Japon à Marseille, attaché à la Culture) et rencontrons quelques connaissances et quelques inconnus. En particulier Franck Stofer, un français vivant au Japon et qui a, là-bas, un label, le label "Sonore". C'est lui qui est responsable de cette programmation éclectique et si japonaise. Un homme simple, direct, accessible, accompagné pour l'occasion de ses parents qui sont restés en France et qui regardent leur rejeton avec amour et admiration.

Puis, nous fonçons dans un autre lieu. Un ancien cinéma récupéré par le théâtre et qui est devenu une petite scène : "l'Odéon". Là, nous retrouvons un groupe de 4 musiciens. Des rappeurs japonais qui font fureur à Tôkyô : Le groupe "Chimidoro". A Tôkyô, nous y serons pendant les deux heures que dureront le concert. Ils sont si différents dans leur approche de la scène, de la musique. Du plaisir et de la nécessité de la scène. C'est très innocent et en même temps d'une précision digne des plus grands. C'est très juvénile, frais, communicatif. C'est vraiment agréable.

Bon, voilà le petit compte-rendu. Je file retrouver ma "mauvaise troupe de Théâtre Nô" ;-) et leur laisserait la parole ce soir. A demain !

Et si vous avez l'occasion d'y aller, n'hésitez pas. Ca dure jusqu'au 28 mars (voir l'affiche). En cliquant sur le titre, vous arriverez sur la page du Théâtre du Nîmes dédiée à "l'Expérience Japonaise".

A vite.

23 mars 2009

Groucho Marx

"Je trouve que la télévision à la maison est très favorable à la culture. Chaque fois que quelqu'un l'allume chez moi, je vais dans la pièce d'à côté et je lis."

Groucho Marx

Bonne soirée à tous.

22 mars 2009

Aux origines de la colère...

Il me faut chercher à comprendre. Accueillir cette épreuve comme toutes les autres et essayer d'en tirer les enseignements. Pour grandir. Encore un peu, grandir...

Hier au soir, lors de la réunion fondatrice de cet immense projet dont je dois vous parler, le démon, encore une fois a jailli. Et encore une fois, a frappé. Et encore une fois, quelqu'un qui m'est cher...

Pourquoi, quand on sait ce que j'ai enduré, ce que j'ai ravalé de larmes et de colère, ce que j'ai toléré, ployant l'échine, pourquoi a-t-il fallu que là, je lâche? Risquant de perdre, encore une fois, un de ceux qui comptent le plus dans ma vie. Pour quelques cacahouètes. Une querelle d'enfants... rien en tout cas qui justifie ma réaction et même, soyons francs, mon action !

Et quand j'y pense ce matin, et quand j'y ai pensé cette nuit, même si j'ai entendu les mots de ceux qui, autour, m'ont dit que j'avais mal agi, que j'avais déconné, je n'arrive pas à le lire, à le comprendre, à le décoder...

La colère est toujours un manque de mots, un manque de confiance en soi ou le miroir de quelque chose qu'on n'aime pas chez soi. Un manque de tolérance envers soi-même. Un manque d'amour envers soi-même. Toujours.

La colère est aveugle, inutile, sourde et bête. Elle est la réaction des faibles, des perdus. Pas celle d'un être qui se veut un exemple, un amant, un ami... un père.

Et pourtant, malgré ça, malgré ce que je me répète depuis minuit, hier soir. Je ne vois pas.

Alors, je vais l'appeler, m'excuser. Peut-être lui saura-t-il me dire ce qui se cache sous cela, ce qu'il a vu à cet endroit ? Je vais l'appeler, écouter, recevoir, puis me taire.

Pour essayer de comprendre. Pour m'armer contre cela. Et devenir cet homme que je m'apprête à être. Simplement.

Bonne journée à vous et à très vite.

20 mars 2009

Réponse à Antoine-Baptiste

Cher Antoine,
Je me suis souvent posé ces questions moi aussi. Qui est artiste et comment celui-là, celui-ci peut être considéré comme tel par les autres, ce faiseur, ce menteur ?! Et puis bien sûr : "comment l'être moi, vraiment et surtout le suis-je ? O oui, vous là-haut, dites-moi, dites-moi que je suis un artiste !"

Avec le temps qui passe, ces questions là s'oublient, parce que c'est l'acte qui prend le dessus. On n'a pas le temps de se demander si l'on est artiste, ce travail-là revient aux autres. Nous, nous nous devons d'être des hommes et c'est loin d'être une mince affaire.

Sois un bon amant pour celle qui partage ton lit. Sois un bon enfant pour ton père et ta mère. Un bon frère pour ta fratrie. Un bon ami pour ceux qui t'aiment. Un bel ennemi pour ceux qui te détestent. Deviens un homme pour toi-même. Tout cela, tu le peux. Et avec ce que tu portes en toi, tu te le dois !

Le reste ne t'appartient pas ! Ariane nous disait souvent quand nous affrontions la scène : "Cherche le petit pour trouver le grand". Dans la vie, nous devons faire de même. Chercher le petit ! Mais pas pour trouver le grand, non. Pour trouver le juste ! L'honnête ! Pour être là, vraiment ! Que nous importe en vrai, si, au final, quelqu'un dit de nous que nous étions un artiste ou pas ? Si nous laissons des enfants armés pour grandir, si nous avons partagé le sourire d'un être cher et qui vous dit merci. Si nous avons gardé les yeux ouverts tout au long du chemin et que dans notre tiroir secret, nous avons des histoires en pagaille à offrir au voyageur qui passe et qui va. Il ne faut pas chercher à convaincre. Il ne faut pas se battre pour un titre ou une note. Il faut être malin, oui. Ne pas foncer tête baissée dans le mur de l'imbécilité qui nous entoure, oui. Donner ce qu'on attend de nous quand on le doit. Mais ce n'est pas cela la vie. La vie est ailleurs. Dans tous ces moments où l'on bâtit pour ceux qui nous entourent (dont nous-même, dont surtout nous-même) et comptent vraiment. Sans chercher le résultat. Mais parce que partager un moment, un instant est ce qu'il y a de plus grand, de plus beau et que quand cela se présente, il faut être prêt, disponible. Le corps délié, les muscles plein, le coeur nettoyé des armures et les blessures offertes.

Laisse leur le soin de choisir, le soin de dire, d'écrire. Et même si c'est bruyant, même si c'est confus. Au fond, ils savent les reconnaître et les apprécier à leur juste valeur. Pas tout de suite. Pas là maintenant. Mais après, quand le calme est revenu, quand le temps est passé. Ceux qui ont oeuvré tout au long de leur vie, fidèles et vrais, sortent du lot, sont reconnus. On les place là-haut, on leur invente une vie qui n'était pas la leur et ils deviennent les exemples qu'ils disent avoir suivi. Même si jamais, non, jamais, ils ne savent le faire au moment où l'artiste arrive, est. Et c'est heureux ainsi !

L'artiste est un être qui agi, fait, grandit, cherche, construit. Quoi qu'on dise de lui, quoi qu'il se passe. Parce que ce qui l'anime, même s'il se perd parfois, est bien plus fort que leurs mots et le ramassera toujours pour l'emmener encore et encore sur son chemin, même s'il est loin des regards, même s'il est loin des éloges.

Et pour toi Gaël que j'aime tant aussi, je voudrais dire : "Bien sûr que l'homme peut changer, évoluer, se transformer". Mais pour accomplir cela, il faut du courage, de la persévérance, de la patience (de la vraie patience, celle qui prend une vie !) et beaucoup d'amour et de foi. L'homme est bon. Tous les hommes sont bons. Parce que tous les hommes, un jour, n'étaient que des bébés et qu'un bébé mauvais, tu le verras quand tu deviendras père, cela n'existe pas. Le mal est juste plus ou moins inscrit dans leur chair trop tendre pour résister aux coups, à la violence, à la bêtise et le travail plus ou moins dur. Deviens d'abord l'homme que tu sens devoir être. Existe. Grandis chaque jour pour préparer ton vieil homme. Qu'il soit magnifique. Qu'il soit un arbre centenaire où les oiseaux aiment à venir se poser. Qu'il garde ce sourire et cette curiosité malicieuse. Tu verras alors que tu peux emmener certaines personnes avec toi. Certaines beaucoup, d'autres moins, d'autres pas. Mais garde cette croyance en la bonté humaine. Coûte que coûte ! C'est le plus beau cadeau que tu pourras te faire.

Je vous aime mes petits gars et je crois fort en vous !

« Et l'on aura ainsi fondé ce qui avait été posé au départ, au titre de postulat méthodologique, à savoir que le « sujet » de la production artistique et de son produit n'est pas l'artiste mais l'ensemble des agents qui ont partie liée avec l'art, qui sont intéressés par l'art, qui ont intérêt à l'art et à l'existence de l'art, qui vivent de l'art et pour l'art, producteurs d'œuvres considérées comme artistiques (grands ou petit, célèbres, c'est-à-dire célébrés, ou inconnus), critiques, collectionneurs, intermédiaires, conservateurs, historiens de l'art, etc. »

extrait d'un texte de Bourdieu

19 mars 2009

"très mauvaise troupe de théâtre Nô": compte-rendu de la séance du mercredi 18 mars 2009

Enfin, avec presque 24 heures de retard, le compte-rendu se rend dans ma boîte aux lettres virtuelle. ;-)

"Mercredi 18 mars 2009

Première séance réunissant la petite "compagnie"

16 heure : début de la séance. La sérénité commence à saturer l'espace. Les huit jeunes "acteurs" se détendent lentement, paisiblement. Ensuite, lorsque les muscles sont bien relâchés et que l'esprit s'est fait légé, le metteur en scène débute la scéance par des conseils et une lecture.
Alexandre nous abreuve de discours directs et nécessaires à la formation d'un comédien en-devenir. L'altruisme, l'humilité, l'implication du corps et de l'âme, l'enthousiasme, la vitalité. A propos de la vitalité qui anime les corps et les pensées des huit "acteurs" libres et en bonne santé que nous sommes, Alexandre insista longuement. Un passage magnifique de Une connaissance inutile écrit par Charlotte Delbo fut lu.

~pause~
(cigarette)

Un moment plus tard, une série d'excercices commencent.
Le premier exercice consiste à marcher de telle sorte que le buste soit tiré vers l'avant par un fil incassable. Les corps doivent être perpendiculaires au ciel. Ils doivent être étirés verticalement, tirés par le ciel et la terre. Les corps doivent s'imposer sur la scène et imposer leur rythme. Le spectateur doit ressentir l'harmonie et la justesse qui modèlent les corps. Cette marche joyeuse est entrecoupée par la voix du metteur en scène. Ce dernier ordonne aux "acteurs" de s'arrêter, les yeux fermés. Il met à l'épreuve notre instinct : "De quelle couleur sont les chaussettes de Jane ? Où se trouve Antoine-Baptiste ?". Cet exercice vise à développer notre capacité à être attentif à l'autre tout en restant intègre à notre personnage.

Puis, les "acteurs" arrêtent de marcher. Le metteur en scène nous demande de nous allonger en suivant une grande expiration.
Les corps sont entièrement allongés sur le sol. Maintenant, il s'agit de nous relever tous en même temps, les yeux fermés, instinctivement. L'instinct est la seule lanterne qui puisse éclairer les "acteurs" à ce moment. Cet exercice fut très difficile à réaliser.

Tous en ligne devant le metteur en scène, la règle reste la même : écouter son instinct et placer son corps sous le joug des énergies qui nous dominent. Nous sommes à genoux, les jambes pliées. Le but est de se mettre sur la plante des pieds sans s'aider des bras. Un impulsion vers la haut seule doit suffir.

Exercice suivant : être seul sur scène et oser dire son prénom. Chacun à tour de rôle se place au centre de la scène, gardien de l'espace qu'il occupe psychiquement et physiquement, monopolisant le regard des autres. La difficulté est grande. Assumer sa présence n'est pas chose facile.
Pour finir la séance Alexandre nous donne quelques conseils vitaux.

Terminus : tous le monde descend du nuage, il est l'heure d'affronter la société, de nouveau.

Sidney


Compte-rendu fait le 19 mars 2009"

mot rapide et cours de japonais

Rose - 08 Octobre 2001 - Naissance - montage du premier soir pour les habitants de ma galaxie

Coucou à vous, amis, aimants, ennemis, indifférents ou émus, je vous salue.

Les mots que j'ai à vous donner n'ont toujours pas le droit de se dévoiler, je les garde là bien au chaud, tout près du coeur. Du coup me viennent des choses à vous raconter, d'une autre nature. De la nature de l'homme, de la nature du père...

Ce matin, Rose a fait un cauchemar. Alors, j'ai pris mon carnet (celui que j'écris à son intention) et j'ai noté son rêve pour elle, plus tard. Je fais cet exercice depuis le quatrième mois avant sa naissance. A cette époque, le jour où j'ai appris que je serais le papa d'une petite fille, j'ai eu très peur de la mort. La mienne. Et de ne jamais la rencontrer. Alors, j'ai acheté un cahier dans le premier carrefour croisé, un gros cahier et je lui ai tenu un compte-rendu détaillé au jour le jour, avec ce qui à l'époque me semblait important de lui dire, de lui laisser, au cas où...

Ce cahier, je l'ai fini quand elle avait un an. Et je me suis demandé si je devais continuer...

Une voix sage m'a fait taire, me disant qu'il fallait aussi qu'elle garde de l'obscurité, des doutes, des souvenirs flous et incertains. Qu'il ne fallait pas que mes mots prennent la place des siens et je me suis tu.

Après des événements douloureux dont nous nous sommes occupés le mieux possible, je me suis décidé à reprendre cet exercice. Au moins pour lui exposer cette histoire (même si nous en avons parlé, même si nous sommes allés voir le psy. Elle, moi, sa mère)... en fait, cette "histoire" n'y est pas. Il est dit à la place : "Il y a une chose dont je voudrais parler avec toi et dont nous parlerons quand tu seras adulte, si tu en as l'envie et le besoin." Il y a des choses qui ne sont pas bonnes à dire ou qui ne peuvent le devenir que si c'est un choix de l'autre. Il y a des choses aussi où l'on est certainement le plus mal placé pour parler. Et si les mots ne s'y sont pas inscrits, dans ce cahier, c'est bien que ce n'était pas le moment ! Alors j'ai pris les traces, enregistrer ses mots et ses dessins du moment et je les garde pour elle, pour le jour du "si jamais..."

Ce matin, j'étais là, dans ces pages. A lui raconter le cauchemar de cette nuit qui l'a poussée à venir nous rejoindre dans le lit. Pour elle, très philosophe, ce cauchemar est le fruit d'un mal au ventre avec lequel elle est allée se coucher. Les cauchemars d'enfants sont si clairs et limpides. Ils racontent tant de choses.

Pour l'heure, nous allons à notre cours de japonais hebdomadaire.


P.S. Sidney n'a toujours rien envoyé. Nous l'attendrons encore un peu...

Belle et claire journée à vous.

18 mars 2009

C'était à Sidney de parler... en attendant, un extrait de Molière d'Ariane Mnouchkine ;-)

Ce soir, comme à chaque fois que je rencontre l'équipe du "Dom Juan", c'était à l'un des apprentis acteurs de faire un compte-rendu sur notre travail ensemble. Mais pas de message mail dans ma boîte... du coup, pas de nouvelles.

Elles arriveront peut-être demain matin?

En attendant, je vous offre cet extrait du film "Molière" d'Ariane Mnouchkine où l'on peut découvrir comment est né le théâtre chez Jean-Baptiste Poquelin, alias Molière.

Dans cette scène magnifique, votre serviteur, alors âgé de trois ans est avec son ami de l'époque, Thomas Felix-François, fils de Guy-Claude François, l'immense scénographe et architecte. Si, si, les deux petits qui causent, c'est nous ! ;-)

A demain !

17 mars 2009

Fragments d'un journal de l'homme ou la parole de Bachelard


Aujourd'hui, je reviens d'un trop grand combat pour parler. J'ai donc cherché sur cette immense toile quelques mots à vous adresser. J'y ai retrouvé Gaston Bachelard, philosophe délicieux, s'il en est et qui nous parle ici de philosophie, pour moi de création.

A bon entendeur, salut ! ;-)

"Pour un philosophe, les premières pages de son livre sont difficiles et graves, car elles l'engagent trop. Le lecteur les veut pleines, claires, rapides, faute de quoi il les taxe de littérature. Le lecteur veut aussi qu'elles lui paraissent directes, c'est-à-dire rattachées à ses propres problèmes, ce qui suppose un accord des esprits, accord que la tâche du philosophe est précisé- ment de mettre en question. La première page est à peine achevée, et voici le fil en filière. On n'a plus le temps de se reprendre, de rectifier, de recommencer. Et, pourtant, si la philosophie est l'étude des commen- cements, comment s'enseignera-t-elle sans de patients recommencements ? Dans l'ordre de l'esprit, com- mencer, c'est avoir la conscience du droit de recom- mencer. La philosophie est une science des origines voulues. A cette condition, la philosophie cesse d'être descriptive pour devenir un acte intime."


[Gaston Bachelard, "Fragments d'un journal de l'homme", in Le Droit de rêver, Paris : PUF, 1970, p. 233]

16 mars 2009

Il y a des jours... prière à entonner ensemble !

Il y a des jours où parler n'est pas à propos. Où le silence cherche le chemin pour laver nos visages.

La nuit a été si courte et la journée sera si longue. Alors se concentrer, ouvrir les pages du Yi King à la recherche du Roi Wen. Il est là. Au pied de cette immense montagne. Il est là, le sourire espiègle et l'oeil vif, toujours prêt à répondre aux questions. Que j'aime ces moments. Où assis près de lui, le poids de l'angoisse, des tourments s'envole. Libéré par ses mots qui savent mettre de l'air même au plus loin d'une porte blindée et sécurisée par mille serrures et mécanismes complexes. Lui, il lui suffit d'un mot pour l'ouvrir cette porte ! D'un seul mot, vrai... humble... à l'écoute du monde. Du ciel et de la terre d'une part, de l'homme de l'autre et de ce qui le fonde : l'amour et la justice. Avec cette trinité et les baguettes d'achillée, il a découvert ce livre-compagnon capable de changer, de muer, de grandir en fonction de votre chemin intérieur.

Dans ce livre, il m'est dit : "Cherche l'éclairage constant du Yin (la force obscure). Ne sois pas brillant comme le soleil qui disparaîtra lors de l'éclipse. Sois la Grande Ourse, qui, constante, montre le nord à celui qui se perd. Le jour de l'éclipse, tu seras celui qui guide et accompagne, qui libère, seul capable de juger."

Alors, je vous demande votre aide. Vous tous qui avez envie d'y croire, qui rêvez d'un monde de l'homme retrouvé, d'un monde où le souffle du ciel retrouvera le clin d'oeil qui le sait, priez avec moi. Et donnez-moi la force d'être cette étoile. Aujourd'hui est un jour majeur. Aujourd'hui, il me faudrait mille pensées, mille amours, mille ferveurs. Alors, nous traverserons l'océan que nous sommes venus traverser, protégés par votre amour, votre foi. Sûrs de la victoire.

Je compte sur vous !

15 mars 2009

A-t-on besoin d'un transport pour voyager? Quel est il?


Image du "Fisher King" de Terry Gilliam

Encore un exercice demandé... Chaque fois que je fais travailler les options-théâtre et ce jour-çi, c'était au tour d'Antoine-Baptiste, je leur donne à charge d'écrire un compte-rendu. Hier, nous nous retrouvions pour travailler un texte qu'il présentera au bac pour l'option légère, à côté du gros programme qu'il a en option-lourde. A lui la parole !

"
Cet après midi, le devoir fut très clair: "Antoine-Baptiste, fais moi voyager."

Il a fallut que j'attende 19 ans de ma vie, pour enfin entendre une telle phrase ! Ce genre de phrase qui vous fait frémir et ressentir le moindre vaisseau sanguin de votre corps. Un genre d'huile qui, poussé par un seul battement de coeur vous purifie la circulation artistique qui est en chacun de nous.

Dans la détonation de ces mots, Alexandre en rajouta quelques uns, ceux qui sont essentiels pour marcher droit, dans une bonne direction, "ne rien avoir à prouver, et se donner." Une notion qu'il me faut enregistrer.

Aussi, j'eus droit à quelques minutes de préparations, de mise en marche de mon appareil, le temps qu'Alexandre s'étire, se détende de sa semaine de course. J'en profitais pour en faire de même mais aussi pour me concentrer et oublier l'aspect négatif et secondaire de la semaine qui prenait fin à chaque expiration.

Avec un démarrage difficile, et une idée du personnage encore trop peu claire, je me lance dans ce défit de partage.

C'est alors que je vois toute les rayures et le disfonctionnement de mon petit parcourt. Je vois que je n'ai pas pris suffisamment d'élan et que je n'étais passur la meilleure piste. Mais Alexandre est là, et me pousse avec une agilité surprenante, comme toujours. Il me pris par la main, comme jamais on l'a fait. Comme des frères d'armes qui s'attrapent par les poignets. Et ce fut immédiat.

En peu de temps je compris que la meilleure des pistes serait celle de l'immersion, j'ai plongé, tant bien que mal, et j'ai nagé vers le fond découvrant des abysses secrets, et étant surpris par "ces flocons aimants et phosphorescents", attiré par le "tourbillonnement magnétique", et émerveillé par la plume que je touchais; je compris que je voyageais, transportant avec moi Alexandre.

Ce fut court. Car le texte à cette particularité d'être extrêmement vivant, et difficilement,
linéaire. Ce texte est fou.

Une grande satisfaction m'envahit quand Alexandre, me remercia ! Cette fierté dont il me parle secrètement, je l'ai ressentit à cette instant, à la pause clope. Un sourire qui permet de voir l'air circuler à travers cet homme.

Je suis content de moi. Et je meurs d'envie de remonter sur scène et de recommencer, encore et encore. Mais je me dis qu'il faut que je préserve ce genre de plaisir, pour que lorsque je les partage ils soient encore tout frais ! En attendant, je vais les travailler, les perfectionner, sous les conseils bien placés d'Alexandre.

Nous avons finis la séance en découpant le texte, et restant dans cette bonne ambiance, celle du voyage.

Mon travail d'acteur consiste maintenant à construire et perfectionner mon personnage, je regarde donc les films qui y sont liés, j'y prend beaucoup de plaisir, et révèle les choses qui me paraissent importantes. L'architecture de mon personnage n'est pas encore bien claire, il me faut y travailler et je décide de m’impliquer comme il se doit à la naissance de ce fou.

"La plume d'ange" de Nougaro... J'avoue n'avoir jamais écouter la chanson, si il y en a une, et c'est peut-être mieux ainsi. Je ne ferais pas une présentation linéaire de ce texte, quoi qu'elle soit nécessaire pour le dossier que j'aurai à rendre, le jour de l'examen... Mais ce texte, que m'a présenté Alexandre, me tient à coeur, non seulement parce que c'est Alexandre qui me l'a proposé, mais aussi parce que c'est un texte ambiguë, un texte joueur, un texte FOU, et qui
correspond littérairement à ce qui me fais vibrer. J'attends par là qu'il y a beaucoup à tirer de ces mots, scéniquement.

De plus, le grand arbre présent dans le texte me fait penser à ce grand artiste que je découvre à chaque instant et que me fait découvrir les aspects secrets et mystiques du monde dans lequel j'évolue petit à petit et dans lequel il me guide. Alexandre Ferran.

Cet après midi j'ai compris qu'il y a d'innombrable moyen de transport pour voyager. Ne serait que pour atteindre le Studio...

Mais qu'on oublie souvent le principal. Nous. Notre être et ce qu'il contient, nos passions, nos envies, nos conditions, etc....

Alexandre m'a rappelé que par l'attitude, la voix, le corps et les détails, nous pouvons transporter qui que ce soit qui est à l'écoute. Et si il ne l'est pas, alors il faut aller le chercher. Ainsi nous pourrions changer tout ce qui déplait tant dans nos quotidiens.

Antoine-Baptiste"

A titre d'information : les films que je lui ai proposé pour travailler sur la folie : "L'Armée des 12 singes", "Vol Au dessus d'un nid de coucou", "The Fisher King", "Gilbert Grape" et "Je suis un Cybord".

Bashung est mort...


C'eut été un beau message : la journée avait été bonne. Retrouvailles sur scène avec un Antoine-Baptiste, grandi, nettoyé... disponible ; avancées, percées des événements majeurs qui se profilent, rendez-vous excitants à venir, à rêver, à mener ; soirée avec Claude Pelopidas, comédien, metteur en scène, directeur du Théâtre "Ainsi de Suite" à Aix-en-Provence (Leur Site), un de ces trop rares bonhommes (un honnête faiseur de théâtre, un vrai !) de notre région.

Il était minuit -déjà aujourd'hui- quand Elise m'a appelé. "Allo, mon amour ! J'arrive... j'ai passé une bonne soirée. J'ai retrouvé Claude...". "Bashung est mort". "Bashung est mort ?!"...

Oui, hier après-midi, à l'hôpital Saint-joseph, Alain Bashung est mort d'un cancer des poumons qui le rongeait depuis trop longtemps. Jeune homme de 61 ans. Il nous laisse quelques unes des plus belles chansons jamais composées.

Je voudrais avoir la force et la générosité de le laisser partir comme cela, sans regrets... Mais j'en ai des regrets !

Des regrets, oui ! Parce que je voulais le joindre depuis longtemps. Je voulais le rencontrer et lui parler d'un rêve que j'avais fait et qui parlait de lui, d'Elle, de Nous. Et par une fâcherie idiote avec Fred au sujet des conditions de travail déplorables aux Dock (où il est le régisseur lumière, excusez-moi du peu !), je n'ai pas mené à bien ce projet. Me privant de ce dernier concert (Dock des Suds l'automne dernier) et de cette rencontre qui, si elle n'était pas gagnée, aurait été peut-être possible.

C'est rare que la mort me touche. C'est quelque chose dont je suis assez fier même ! Mais là, quand Elise m'a annoncé ça au téléphone, quelque chose en moi s'est brisé et le noir tout autour a pénétré mes os, me laissant tremblant, fébrile. J'ai eu mal, vraiment mal.

Ce matin, en même temps que je vous écrit, je lui rends mon hommage. Avec "Bijou, bijou" plein mon jardin, en boucle, offert au soleil qui réchauffe et aux oiseaux qui chantent, avec lui.

Nous allons te regretter ici. Profondément. J'aurais voulu que tu rencontres Elisabeth et qu'ensemble, nous le fassions ce spectacle. Ca t'aurait plu, c'est sûr. Ca nous aurait plu. Elle qui m'a appris à t'aimer et qui est ton amante depuis tant d'années. Elle qui t'écoute lui murmurer à l'oreille, rougissante et fébrile... Comment je vais la consoler ce matin, Monsieur. Qui va l'emmener aujourd'hui là où elle te retrouvait ? Tu nous laisses un putain de vide, un putain de mal de bide et un cri planté en travers de la gorge... Tu vas nous manquer ! Vraiment.

A plus tard.

14 mars 2009

Vis à Vies, des Vies, des vis, un voyage, du partage


Toujours sur ma terrasse et les oiseaux, plus nombreux chaque jour, annoncent leur retour. C'est le printemps qui arrive. C'est beau le printemps !

Rohhhhh ! Hier soir en rentrant, j'avais tellement de choses à vous dire... mais pas la force de les écrire ! Il était deux heures du matin, peu d'étoiles au ciel, mais de la musique plein la tête et le bonheur d'être là, simplement là.

Quand j'étais plus jeune, je voulais mourir vite, vivre vingt ou trente ans maximum, d'épuisement, d'une mort violente. Mais aujourd'hui, les choses ont bien changé ! Chaque jour me réserve de nouvelles surprises, de nouveaux visages, de nouvelles rencontres, de nouveaux voyages. Alors on en vient à faire attention à soi. A soigner ses mouvements, son sommeil (enfin quand on peut), à calmer la machine en lui disant : "attention, il te reste au moins cent à cent cinquante ans à vivre." Oui, je voudrais. Pouvoir grandir encore d'au moins cela. Pour que réellement mon corps se vide de tout le venin qui s'y cache et qu'il ne reste que la douceur et l'amour, que le sourire de regarder les gens passer, se dépasser. Et se réveiller chaque matin, en respirant le ciel de tous ces poumons retrouvés et s'octroyer une nouvelle fête. Fête de la vie, de la rencontre, de l'amour, des idées. Fête du partage, de la solitude. Fête ! Fête ! Fête !

Hier soir, je pensais au cinéma, à la télé. Je me disais que ces arts nouveaux avaient encore beaucoup de chemin à faire avant de pouvoir espérer être à la hauteur du théâtre. Nous sommes les plus vieux. Nous avons eu ce temps de maturation qu'ils n'ont pas eu et l'humilité qui leur fait tant défaut. Honnêtement, je suis sûr que la télévision est en train de mourir ! C'est déjà tellement vicié, abîmé, qu'il faudrait un miracle pour la sauver. Internet a pris le relais et en donnant la parole au monde entier, va finir de la tuer. Tant mieux. Tant mieux si les Mac Do disparaissent pour un temps. Le temps que les gens retrouvent le plaisir de manger et le goût. Tant mieux si la télé disparait pour un temps. Le temps que les gens retrouvent le plaisir de vivre et de rêver. Se donner le droit de grandir coûte, fatigue, demande des efforts. Mais qu'est-ce que c'est bon !!!! Allez. Vous qui m'accompagnez ici. Éteignez vos postes. Jetez ces tubes cathodiques ou branchez leur un lecteur DVD en guise de réponse, en guise d'espoir, de respect pour vous même. Mais arrêtez de leur laisser croire que cette nourriture pré mâchée, irréfléchie, sans aucune poésie vous convient. Parce qu'elle ne vous convient pas. Je le vois bien. Partout dans les rues, dans les informations que je glane au hasard des lectures, des radios, je l'entends. Elle ne vous convient pas.

Vous avez éteint ?! Alors respirez un bon coup. Contemplez le monde autour de vous. Écoutez... Vous entendez la place qu'il y a pour rêver et construire, rencontrer ? Les autres, mais aussi vous-même... De quoi rêver-vous ? (réponses dans vos commentaires ;-))

Ah oui ! "Vis à Vies". Quelle belle histoire ! Quel plaisir de travailler au service de cette équipe humaine, drôle, investie et en même temps si rigoureuse. Et quel spectacle ! Ce n'est pas un "Grand" spectacle, mais un petit spectacle. Comme je les aime. Humble, simple, joli, doux et qui dit des choses essentielles. Ils ne cherchent pas à vous en mettre plein la vue, non ! Ils sont là, juste là, maintenant, au présent. Ca vous requinquerait un mort ! Et on sort de là sifflotant avec l'envie de prendre dans les bras la première fille en jupe d'été croisée, pour la faire tourner, tourner, tourner... et rire !

Merci Gérard et Myriam ! De toute mon âme, mon sérieux, mon amour, j'ai essayé d'être à la hauteur de leur jeu, mais de retrouver une console lumière après tant de temps, de redécouvrir le spectacle après tant de temps a été difficile. J'ai fait des erreurs dans ma conduite malgré ma concentration et ma ferveur. Et ils ont joué avec. Les pauvres... Fabien !!!! Reviens !!! Ils auraient pu en être fâché, mais non ! Ils ne l'ont pas été. Ils ont juste dit : "La prochaine fois, on prendra plus de temps ! ". Que certains ici méditent là-dessus, ça leur ferait du bien !

Je pense à cette femme, soit disant artiste- une imbue, oui !- qui, hier, a pourri Fabien pour une erreur de conduite (lumière) et qui fait des spectacles hooooorrribles. Et qui n'a même pas la simplicité de voir que ce petit bonhomme a donné son temps, son énergie. Sans compter. Pour que son "spectacle" ressemble à quelque chose. Mal payé, mal reçu. Mais il l'a fait. Pour le public, pour le spectacle, pour lui-même. Il l'a fait.

Ne vous laissez pas abîmer, je vous en conjure ! Ils sont là les précieux, les amoureux, les honnêtes... juste à côté. Ils vous attendent, ont besoin de vous. De vous entiers, vraiment. De vos savoirs, de vos expériences, de votre confiance et de votre foi. Ne laissez pas les idiots vous en déposséder, sinon vous finirez comme eux. Respectez-vous. Toujours !

Gardez l'espoir et le courage, on y arrivera. C'est écrit ! ;-)

Bien à vous.

13 mars 2009

Pas de cigarette...

Réveil difficile... les mots d'Ariane, hier soir, qui m'ont un poil blessé, la distance d'Elise que je ne rencontre plus ces derniers jours et la fatigue ont appelé le mauvais Alexandre. Celui qui a peur, celui qui a mal, qui voudrait disparaître, là. Qui trouve tout injuste, qui appelle dans le noir : "MAMAN!!!!!!", la morve au nez, les yeux rougis de larmes devant la fourmi qu'il vient de déchiqueter patte après patte, en prenant soin de séparer, à la fin, la tête du corps. Entre ses ongles. Celui qui cherche à détruire parce que construire est long et douloureux. Qui préférerait être avalé par la mort et qu'on le laisse tranquille à tout jamais. "Taire. Se taire. Se terrer..." Début du spectacle "Elle Attend" qui raconte bien ce bonhomme là, je crois.

Et pour couronner le tout, voilà que ce matin, je n'ai plus de cigarettes !

Bon... mais le monde est bien fait. D'abord Ariane qui me tape sur les doigts ! Ouch ! Ensuite, aujourd'hui, je vous le donne en mille, je suis technicien. Au service du rêve des autres. Et je vais si bien m'y appliquer que ces vieilles blessures seront vite refermées. Oui, je remplace Fabien et vais assurer les lumières d'un petit spectacle tout joli, tout doux, avec une équipe très, très, très sympathique et très, très, très investie. Ca va me faire du bien !

Quand je n'aurai plus besoin de ces plans technique pour survivre, je vous en prie, rappelez-moi à l'ordre. C'est un à côté qui me fait trop de bien pour l'abandonner à tout jamais. Vous me le rappellerez ?

Bonne journée à vous et à demain matin !

Demain, je retrouve Antoine Baptiste et sa "Plume d'Ange" pour une après-midi de répétitions.... ça aussi ça va me faire du bien. De faire un peu de théâtre et d'arrêter d'en parler !

A vite !

12 mars 2009

Shakespeare et compagnie...

Les jours qui viennent de passer ont eu raison de mes petits rituels. Et ce n'est pas sans peine que j'ai enclenché le frein d'urgence hier au milieu de la nuit. STOOOOOOOOP ! Crissements des orteils, les yeux plus bas que bouche, un palpitant au rythme lent et inquiétant, les crocs dehors, la tête idiote... bon, j'arrête là, non ?!
Donc... Repos. Calme. Reprendre les choses au début, une par une. Caaaaaalmement.
Ouf ! Ca y est. Et me voilà à nouveau avec les amandiers en fleur dans mon jardin. A respirer l'air, à rêver loin et large, posément.

Le coup de feu est passé. Nous avons été là. Trois jours intenses et nécessaires. Maintenant, il faut reprendre du champ et réfléchir et penser la stratégie. Revoir les cartes, se mettre dans la tête de tous ceux qui sont autour, sortir les pierres du sac et les poser l'une après l'autre.

Et si je n'ai pas écrit hier (enfin si j'ai écrit, mais... pas raconté) c'est que mardi soir, je suis allé à Draguignan retrouver quelques frères de théâtre que Paul Golub (un metteur en scène, un ancien du Soleil aussi) a réuni dans sa mise en scène de "La Puce à l'Oreille" de Feydeau. Et c'était bien. Enfin, Feydeau... non, mais cette distribution, ces acteurs au plaisir non feint, non dissimulé, nous ont offert deux heures et demi de pur plaisir. Tous. Avec des personnages clairs et un jeu maîtrisé (parfois un poil trop). De vrais beaux acteurs de théâtre ! Après... après je suis resté là-bas et j'ai profité de ces amis le temps d'une trop courte nuit, avant qu'ils ne redécollent pour Paris. Martial, Rainer, Brontis et Paul que j'ai découvert un peu plus et qui est un garçon assez délicieux, en fait.

Et puis, il y a eu ces trois jours qui m'ont tant occupé, une rampe de lancement à construire à la hâte pour un rêve que je fais depuis des années et qui semble prêt à voir le jour. Je reste encore vague et je m'en excuse, mais d'ici peu, je vous dirai tout et j'aurai alors besoin de vous tous et de votre foi, de votre imaginaire, de votre ferveur. Et il nous faudra être nombreux pour réaliser ce pari fou et génial.

Ah oui ! Le titre... Ca c'est parce que avant hier, nous avons eu le bonheur de découvrir une toile du plus gand auteur de théâtre de toute notre courte histoire. Il est ici âgé de 46 ans. C'est la seule toile existante et certifiée de son vivant. Je voulais vous le présenter. Pour ceux qui n'auraient pas eu le temps de le voir ou de le savoir. Voilà la vraie tête de Shakespeare. Il est si beau, si là... vous ne trouvez pas ?!


Allez, jeunes gens, je vous laisse. Je vais reprendre le cours de mon ruisseau et vous retrouve ce soir, peut-être.

A vite.

11 mars 2009

non... en fait !

Non, en fait, ce soir, je n'arrive pas !
Trop de choses à gérer, à penser, à faire. Hier à Draguignan, ce matin ici. En trois jours, la face du monde a changé... c'est beaucoup pour mes petites épaules. Ca concocte et demain ou vendredi, ça aura un peu décanté.

Allez au repos les loulous.

Sinon, je vais faire des bêtises et là... je n'ai vraiment pas le droit ! pfffffffiou

J'aaaaaaarrrrrriiiiiiivvvvvveeeeeee

Allez !
Encore deux heures et c'est promis je viens ici vous retrouver un peu et vous expliquer mon silence du jour....

A tout !

Et un petit poème à accrocher au mur de ses yeux. En attendant ;-)

Prière aux vivants pour leur pardonner d’être vivants

" Vous qui passez

bien habillés de tous vos muscles

un vêtement qui vous va bien

qui vous va mal

qui vous va à peu près

vous qui passez

animés d’une vie tumultueuse aux artères

et bien collée au squelette

d’un pas alerte sportif lourdaud

rieurs renfrognés, vous êtes beaux

si quelconques

si quelconquement tout le monde

tellement beaux d’être quelconques

diversement

avec cette vie qui vous empêche

de sentir votre buste qui suit la jambe

votre main au chapeau

votre main sur le coeur

la rotule qui roule doucement au genou

comment vous pardonner d’être vivants...

Vous qui passez

bien habillés de tous vos muscles

comment vous pardonner

ils sont morts tous

Vous passez et vous buvez aux terrasses

vous êtes heureux elle vous aime

mauvaise humeur souci d’argent

comment comment

vous pardonner d’être vivants

comment comment

vous ferez-vous pardonner

par ceux-là qui sont morts

pour que vous passiez

bien habillés de tous vos muscles

que vous buviez aux terrasses

que vous soyez plus jeunes chaque printemps


Je vous en supplie

faites quelque chose

apprenez un pas

une danse

quelque chose qui vous justifie

qui vous donne le droit

d\’être habillés de votre peau de votre poil

apprenez à marcher et à rire

parce que ce serait trop bête

à la fin

que tant soient morts

et que vous viviez

sans rien faire de votre vie.

Je reviens

d’au-delà de la connaissance

il faut maintenant désapprendre

je vois bien qu’autrement

je ne pourrais plus vivre.

Et puis

mieux vaut ne pas y croire

à ces histoires

de revenants

plus jamais vous ne dormirez

si jamais vous les croyez

ces spectres revenants

ces revenants

qui reviennent

sans pouvoir même

expliquer comment. "

Charlotte DELBO

10 mars 2009

Passage éclair...

J'aime cet endroit ! Chaque jour que j'y passe, un peu plus...
Je crois que je commence à comprendre pourquoi il y a onze ans, je décidais de quitter Paris, la Capitale pour venir faire du théâtre, ici.
Non, non. Ce n'est pas le soleil, ni le temps délicieux (ça je l'ai découvert en route), mais plutôt un besoin de prendre de la distance pour mettre au monde mon théâtre.

Aujourd'hui, je crois que j'ai suffisamment cheminé pour pouvoir reprendre, avec ceux que j'ai quitté alors, le dialogue et les échanges.

Je profite des fleurs d'amandiers qui sont encore debout et fait un rêve qui va rester un secret encore quelques temps. Un rêve pour nous tous, ici. Un rêve de théâtre. Un rêve qui fera que plus jamais le théâtre ici ne sera, cet art de l'excuse, ce flamboiement éclair de la honte, mais un arbre avec de vraies racines. Profondes. Je fais ce rêve depuis longtemps, mais voilà que les signes de la mise en route commencent doucement à arriver.

J'ai besoin de rester calme, concentré, encore plus concentré. Et de faire comme la fourmi qui baisse les yeux sur son ouvrage. Je le sens bien, le moment doit être comme cela. Il le faudrait. Mais dormir devient difficile et je sens bien que mes muscles ne me laissent pas au repos. Il faut parfois se battre contre soi-même. Se battre contre le trop plein d'énergie. Contre le tonnerre qui gronde et frappe dedans. Pour ne pas effrayer. Pour ne pas blesser ceux dehors. Leur laisser le temps de comprendre, d'entendre.

Hier, j'ai fait mes courses sur Internet. Beaucoup de livres sur le Nô (des introuvables) et sur le théâtre de Charlotte Delbo (des introuvables aussi). C'est ce qui est génial avec internet. C'est ça qui est dangereux aussi. Tout est là pour celui qui sait chercher. Tout ? Trop ? Non, pas trop, mais pour certains la possibilité de répondre à des questions qu'avant ils se posaient pendant des années avant de pouvoir y répondre. Le temps de la recherche, le temps de la question sont importants. Et même si ils peuvent être compressés, il ne faut pas oublier que c'est important. Et le prendre. Oui, prendre le temps. Toujours. D'y croire. De réaliser son édifice pierre après pierre. Pour que le jour où un problème se présente, on puisse y faire face. Connaissant chaque pierre, chaque parcelle de ce qui fonde notre maison.

Allez, bonne journée à vous.

Et promis, je parlerai bientôt !

Ah ! Oui ! Le nouveau site du studio commence à voir le jour. Allez y faire un tour et aidez-nous à le peaufiner. Il est en cours de construction. Nous sommes dedans, nous avons peut-être oublié quelque chose ou brouiller les pistes ? Les idées et commentaires sont les bienvenus. http://lestudiodusoleil.fr (page accessible sur le site de l'école aussi http://studiodusoleil.ouvaton.org, partie compagnie)

09 mars 2009

Oriza Hirata et Ariane Mnouchkine... Beau Week-End !


Les amandiers sont en fleurs, le ciel : bleu pur, le café : puissant, j'entends les pattes d'écureuils scratcher dans les arbres en réponse aux appels des oiseaux... oui, c'est ça ! je suis rentré chez moi !!!

Et c'est avec un plaisir non feint que je déguste mon café en venant vous trouver dans ce jardin sans frontières et qui a partagé avec moi bien plus que je ne pourrais écrire.

Ce week-end fut chargé, ouvrant des portes inespérées entre mes rêves et la réalité, donnant à ces multiples combats un peu de plus de sens, un peu plus de fond.

D'abord Ariane et son anniversaire. Soixante-dix ans et une fête qui, comme elle, s'est épurée avec le temps, s'est simplifiée, adoucie, calmée. Pour finalement devenir ce joli rendez-vous où seuls quelques intimes (enfin deux cents personnes tout de même !) étaient présentes. Il y avait Guy Claude François, ce décorateur et scénographe de génie qui a accompagné sa vie depuis plus loin que remonte ma mémoire et qui, lui aussi, plus le temps passe, est beau et doux, simple et sincère, délicieux. Il y avait Tamani, la femme qui venait nous accompagner dans nos maquillages, elle qui a maquillé les plus grands, encore plus petite, encore plus vieille et en même temps toujours plus vive et drôle. Il y avait Erhard Stiefel, ce génie, ce "Trésor Vivant" (titre décerné par les japonais à quelques élus), fidèle à lui-même, toujours aussi beau et énigmatique, lui qui, malgré son grand âge, ressemblera toujours à un jeune romantique. Il y avait Gérard Hardy, un jeune homme de soixante-quatorse ans, toujours en tournée, toujours sur la scène et qui a cette douceur et ce plaisir de vivre (je lui dois un merci attentif et particulier. Il m'a donné la référence d'un livre qui va bien m'aider dans mes travaux en ce moment : Au Bord de l'Eau. Qui raconte l'histoire d'une troupe de théâtre à travers l'histoire de chaque membre qui la compose). Il y avait Georges Bigot, cet acteur qui peut être si superbe, héros de mon enfance, Richard 2 incroyable, Norodom criant de vérité. Il y avait François, dont je ne sais plus le nom, et qui de ses mains sait fabriquer tout et n'importe quoi, un peu comme un magicien. Il y avait Brontis Jodorowsky, Miriam Azencot, Martial Jacques, Christophe Rauck, Juliette Plumcoq Mech, compagnons de mon époque et que j'ai eu plaisir à revoir après tout ce temps. Et puis tous les membres de la troupe, de maintenant. Qui entourent ma Belle Ariane de mille soins, de tant d'amour et qui lui permettent aussi ce calme, cette douceur. Il y avait les proches d'Ariane. Sa famille, ses amis, dont le plus connu Patrice Chereau. Et c'était beau ! Simple et beau. Avec des surprises offertes à l'aide de nos nouvelles technologies. Sur grand écran, des gens du monde entier ont défilé grâce à Skype, pour ne pas le nommer. Amis d'Australie, du Brésil, des Etats-Unis, de France... mais aussi, astronautes en apesanteur, Charlie Chaplin (si, si), le président Obama (bon... ceux-là c'était pas en vrai de vrai, mais en vrai quand même!!!!). Bref, un moment de magie délicieux. Ah oui ! Merci à Jean-Jacques, aux Afghans et à Céraphin qui nous ont concocté un repas digne des plus grands avec un dessert incroyable arrivé sur un char et représentant un immense soleil que nous avons avalé gouluement ! Ouf... voilà, j'ai fini la soirée du samedi... il vous reste un peu de temps ou d'envie d'aller plus loin ?!

Alors pour ceux qui en ont le courage... le dimanche ! (Mais d'abord, je vais me resservir un café et faire un bisou à mon amoureuse)

Donc, le dimanche. Grâce à Yumie, la japonaise qui traduit tous mes dossiers et mails à l'attention des japonais, nous avons obtenu un rendez-vous avec Oriza Hirata, metteur en scène japonais qui est au Japon, ce que Ariane Mnouckine et Peter Brook sont à la France.

C'est donc à 14h45 (les japonais sont très à cheval sur les horaires) que nous sommes arrivés dans le Hall de l'Hôtel Mercure de la Gare Saint-Lazare où nous avions rendez-vous à 15h. Après une course éfrénée d'Elise pour trouver une borne qui fait les cartes de visite (les japonais sont très à cheval sur les cartes de visite ;-)) d'où elle revient sans et pour ma part, une recherche rapide sur internet pour voir des images du Monsieur et sa biographie (vive l'Iphone !!!), Orizo arrive accompagné de sa traductrice. C'est un petit homme vif, au visage espiègle et malin qui inspire tout de suite confiance et respect. Nous nous installons et je lui explique mon projet Kujoyama dans les moindres détails. De temps à autre, je me tais pour laisser la traductrice faire son oeuvre. Elise, elle, profite de ces moments pour me donner quelques conseils d'approche. Lui se tait. Il écoute. Une fois le tout exposé, il entre en scène. Il me dit que, si mon projet lui semble intéressant, mon approche est nulle. (Ouah ! Un japonais franc... celui-là il va falloir que je le soigne de toute mon âme pour ne pas perdre sa confiance et ses faveurs) Et m'expose la "stratégie" à suivre. Il emploiera ce mot. Il m'expose le mode de subventions au Japon et comment s'assurer d'avoir les meilleurs pour la réalisation de ce projet. Il me dit que si nous oeuvrons comme il le dit, il organisera avec moi les "workshops" (stages) avec les meilleurs acteurs de Tokyo, de Kyoto et d'Osaka pour qu'ils découvrent mon travail sur la scène et que, naturellement, suite à ces travaux, les plus intéressés se réunissent pour mettre à exécution mon projet. Il me dit aussi qu'il me faudra organiser des "workshops" avec des metteurs en scène. Lui s'occupe de trouver les lieux, de payer les acteurs et les metteurs en scène pendant les temps des "workshops" et de suivre l'équipe qui montera mon projet pour l'obtention des subventions, afin de réaliser tout cela pour la saison 2011, 2012. Moi, en attendant, je dois trouver des co-producteurs ici sur le sol français.

Pour "Les Démons du Nô"... et oui, ils sont deux maintenant ! Il me fait comprendre que si jamais Ariane prend la mise en scène de ce projet, il nous invitera pour le festival de Tokyo (à l'auttomne). Je lui rétorque que faire se déplacer le Théâtre du Soleil coûte très cher. Il me dit : "l'Argent n'est pas un problème".

Une heure et demie sont passées quand nous le quittons. Je garderai longtemps gravé le sourire et l'oeil malicieux de cet homme et sa simplicité, et sa sincérité. Wouah! Je viens de faire un pas de géant, je crois. Mais, il faut tenir la bride. Si Cultures France ne retient pas mon projet, tout cela tombe à l'eau. Donc, on garde son calme. On est serein, mais on garde son calme (tu parles !!!! ;-))

Voilà.

Maintenant, il me faut redescendre sur terre et continuer à travailler, patiemment, méthodiquement, pour rendre tout cela possible.

A vite.

07 mars 2009

Etrange humain...

Sous un ciel gris et bas, je retrouve ma ville.

Je retrouve... Je ne sais pas si aujourd'hui encore, je suis capable de "retrouver" ma ville. De "retrouver" le théâtre d'ici et ces gens qui le font. Je ne sais pas. Si j'ai encore envie de "retrouver"...

Comme un enfant qui préfère rester loin de cette réalité qu'il découvre et qui ne colle pas ! Comment peut-il "retrouver" celui qu'il appelait "père" quand ce dernier a fini de perdre les dernières écailles de sa peinture cloquée, quand ce que l'enfant découvre avec ses nouveaux yeux de quelques centimètres plus grand que lui, est la bêtise et la laideur !

Et ce rythlme qui aveugle, et ce bruit qui endort, et toutes leurs armes qui brouillent les visages, maintenant qu'il est loin, maintenant qu'il se réveille au chant des oiseaux, maintenant qu'il découvre dans le silence ce petit enfant qui avance et lui demande son chemin avec les mots simples de ceux qui n'ont rien à prouver, comment peut-il revenir et "retrouver".

Et lui-même ! Lui qui là-bas est devenu un homme, ici aussi on lui demande de se "retrouver". De remettre ce même costume Kenzo. Noir le costume ! C'est qu'il fait partie des gens du théâtre quand même ! Ce costume qu'il a déchiré le premier jour, à la première heure en arrivant ici, en essayant de se faire un feu pour réchauffer ce corps qui ne connaissait pas le froid.

Alors, on se réveille un samedi matin sous une chape de bêton et la tête pâteuse comme quelqu'un qui aurait noyé ses nerfs au whysky ... et on a honte. Honte de voir qu'ici, on serait capable de "retrouver" ce dont la vie nous a défait, quoi qu'il en coûte. Oui, ce matin j'ai honte !

Parce que je n'ai pas su leur dire : "Pourquoi me parles-tu de demain, d'hier, d'après, d'avant. C'est ici que nous sommes. Juste là. N'avons-nous donc plus rien à nous dire ?" Parce que j'ai vendu l'âme de mon jeune guerrier à ceux-là qui ne sauront jamais l'entendre tant qu'ils ne l'auront pas vu sur la scène du Théâtre de l'Odéon. Parce que je me suis justifié, le coeur battant, blessé par des mots et des idées que je ne connais plus. Alors oui, j'ai honte !... enfin, non, ce n'est pas vrai. Je n'ai pas honte, mais j'ai dans le coeur cette tâche empreinte de gravité.

Alors ce matin, en attendant qu'ils se lèvent, je me remémore qui je suis. Je ramasse mes morceaux balancés là par terre, je les remets droits, leur enlève les traces de gerbe et de crachat et frotte. Et je les regarde. Chacun après l'autre. Je prends le temps de les retrouver. Et je demande pardon. Oui, pardon à chacun.

Le chemin est long qui mène à être au dehors ce qu'on souhaite être au dedans. Mais il se fait. Il suffit de reprendre la marche. De relever le nez et de regarder tout autour les milliers d'horizons encore ouverts et qui appellent. De remplir sa gourde d'eau fraiche et de reprendre le chemin.

Un jour, un jour, nous ne retrouverons vraiment. Parce qu'alors, je n'aurais plus besoin de vous dire, vous expliquer. De me dire, de m'expliquer... Nous nous retrouverons autour de cette table et nos yeux se raconteront des histoires que les langues ne savent plus dire. Et nos chairs vibreront ensemble. Juste ensemble, là.

Bonne journée les loups ! et vous aussi mes agneaux...

Vous me manquez !

06 mars 2009

Biennale de Nîmes, Hannya et autres histoires....



Moi qui voulais profiter de cette matinée pour faire la grasse ! L'horloge interne souvent si défaillante, m'a mis sur pied comme chaque jour ! "Laisse-moi tranquille ! Je n'écrirai pas aujourd'hui ! " Mais rien à faire. Il faut se lever...

Peut-être aussi, les histoires de la Biennale de Nîmes n'y sont pas pour rien... et d'ailleurs avant que de venir vous retrouver, j'ai déjà passé cinq coup de fil, envoyé trois mails pour essayer de débloquer la situation.

Laquelle, me direz-vous ?! Et bien voilà...

Le Théâtre du Nîmes organise (et je l'ai appris avant hier) du 24 au 28 mars, une biennale de la jeune création japonaise : Musique, danse, théâtre, arts plastiques. Alors, innocemment, quand j'apprends cela, après ma journée d'écriture, je me rue sur mon mail et j'écris à la direction que je veux absolument pouvoir être là. Rencontrer ces artistes, voir leurs spectacles et avancer ainsi sur mon projet Kujoyama. Je leur envoie mes dossiers : Projets, Presse, Photos, etc. et leur demande s'ils peuvent m'offrir le pass (150 euros tarif plein/86 pour les chômeurs), s'ils peuvent me trouver un endroit où dormir (même un placard à balai) et s'ils peuvent me permettre de vivre cette aventure de l'intérieur pour que j'ai une chance de rencontrer les artistes. Avec ce que je viens de vivre, avec la rencontre puissante et douce de ces jeunes autour de Dom Juan, avec le stage au Théâtre du Soleil, c'est très sûr de moi que j'attends une réponse positive, du genre : "Mais bien sûr ! Nous sommes très touchés qu'un artiste français de la région désire venir rencontrer nos artistes et partager ce moment unique avec nous. C'est, en secret, notre but, etc." Mais que nenni ! Nous ne sommes pas des mécènes, me dit-on ! Et votre outrecuidance passe les bornes ! Loin de juste ne pas réussir à les toucher, je les énerve ! On s'explique au téléphone, on se comprend mieux. Mais il n'empêche qu'ils ne peuvent pas m'aider, si ce n'est en me facilitant la rencontre avec les artistes, ce qui est déjà énorme.

Du coup, c'est 800 euros que je dois trouver, là, comme ça ! Et 800 euros, je ne les ai pas. Oui, je suis intermittent. Mais les six derniers mois m'ont coûté cher. Le temps d'écriture des dossiers (Picasso, Kujoyama, Dom Juan), les impressions multiples et variées, les voyages à Paris, les envois, le temps passé sur Dom Juan, les coups de téléphone pour mettre tout ça en place, ma résidence d'écriture... tout ça, personne ne le paye pour moi. Et c'est une grande part de mes assedic qui se dilapide là ! C'est normal, me direz-vous et je suis d'accord. Entièrement d'accord, c'est à mon sens, exactement le pourquoi des assédic, en tout cas ce qu'il devrait être pour tout un chacun. Mais là, même en raclant les fonds de tiroirs, je ne peux pas m'offrir cette semaine ! C'est ainsi.

Cela explique peut-être pourquoi ce matin au lieu de dormir, j'ai appelé Jean Florès, le Directeur du Théâtre de Grasse qui accompagne mon travail depuis un bout de temps pour lui demander ces sous. J'ai appelé aussi Michèle Couetmeur et Thierry Roche, responsables à Aix et dans la CPA au niveau culturel et en lien avec moi sur le projet Kujoyama pour leur demander ces sous. Parce que je n'ai pas beaucoup de temps pour me retourner. Une dizaine de jours tout au plus. Et sans cela, sans une aide extérieure, je râterai ce moment. Moment unique si l'on y pense. Ce n'est pas tous les jours qu'autant de jeunes artistes japonais sont réunis ensembles sur le sol français. Mais bon ! Si cela ne doit pas être, cela ne sera pas. Et cela aura raison de ne pas être. C'est toujours ce que je me dis et c'est un très bon moyen d'apprendre à construire aussi avec les impossibilités.

Voilà...

Ah oui ! Hannya ! Pourquoi Hannya ? Parce que ce masque m'a tenu compagnie toute la semaine, posé face à moi, impassible, calme et que j'ai appris à la regarder, à voir sous ses traits les traits d'une femme blessée, battue, mais qui n'a pas lâché. Elle aussi est devenue une intime ! Et je voulais la saluer ici et lui dire merci de sa patience et de son regard qui m'a tant soutenu.

A plus !


P.S. Avez-vous vu avec quelle ferveur elle me regarde ! Je crois qu'elle est tombée amoureuse ;-)

Ah ! Oui, aujourd'hui je pars à Paris et je n'aurai sûrement pas de connexion pendant ces deux jours... donc vacances de blog. C'est le moment d'en profiter pour venir vous y retrouver et discuter un peu. Quand le chat n'est pas là, les souris dansent dit-on, non ?!

05 mars 2009

1+2+3+4+5 = 28

Ca y est !
Le premier voyage au monastère s'achève au bas de la seconde scène. Cinq jours de travail, vingt-huit pages bien remplies, promettant de longs voyages solitaires au côté de tous ces personnages qui ont un peu pris vie.
Il y a Kiyotsugu (Kanami), Ogamé (acteur comique et nounou de Zeami, le seul à savoir lire et écrire excepté le Maître et Fujiwaka), Fujiwaka (Zeami de 12 ans), Tamana(la mère de Zeami et femme de Kanami), il y a Otozuru (la danseuse Kuse), Meïsho (le joueur de flûte souvent saoul), Ippen, Fuzen et Jumon (les joueurs de tambours), Hachi (l'intendant de cette maisonnée), Daïjo (le Supérieur du Temple Jozen... un sale enfoiré !!!), il y a Toyodayo (l'acteur Shite, celui qui jouent les rôles principaux au côté du maître, grand conciliateur) et Kumazen (le waki, le second rôle, un vrai bougon!), un messager du Temple (qui vient chercher Fujiwaka, mais je ne vous dirai pas pourquoi...) et les danseuses de Kuse : j'ai nommé Matsujo, Wakatsuru, Chiyo. Voilà !

Une sacrée brochette de personnalités qui vont et viennent. De belles rencontres, des larmes aussi. Des pertes. Des trouvailles. Une jolie route qui s'ouvre et promet d'être longue. Mais le temps est mon ami et je n'ai pas envie de me presser, de les presser. Ils faut que je les apprivoise, les appelle, les rêve.

Allez, bonne soirée à tous.

Moi je vais manger !

4eme jour... n'importe quoi 5eme jour !!!

Allez, c'est reparti...
Ce matin, j'ai du retard à rattraper. Le bain d'hier soir aura été salvateur. Du temps, l'ami. Tout cela prendra du temps. Alors rester calme et continuer à cheminer aux côtés de ces personnages si attachants et si vrais. Ils feront ce que je ne sais pas faire. J'en suis sûr.

A ce soir !

04 mars 2009

Deux petites pages !!! Rude journée

Rude journée ! !!
Oui, c'est exactement cela, une rude journée...
Pourquoi ?
Plein de raisons, je suppose.

D'abord, j'ai commencé ce matin avec une heure de retard. J'ai traîné, répondu aux mails, plus fumé, plus bu de cafés, pris plus de temps sous la douche, pris plus de temps pour m'habiller.

Ensuite, il y a ce foutu relâchement. Après un début qui est venu facilement, assez facilement et le sentiment tout à coup que ça y est, ça va s'écrire, c'est sûr ! Du coup, on se couche plus tard, on fait moins attention, on regarde de beaux films... on se disperse !

Aussi, le moment. Dans la pièce, je veux dire ! Un moment charnière et délicat. Quand Kanami, le père de Zeami découvre la musique Kuse (Kusemai) qui va littéralement transformé son théâtre et le faire devenir celui qu'on connaît aujourd'hui. Faut-il montrer ce moment ? Le cacher ? N'est-ce pas une pente vers le folklorique ? Comment rester universel ici aussi et laisser le champ ouvert aux metteurs en scène qui auront envie de raconter cette histoire. Parce qu'il me semble évident, chaque jour un peu plus, que ce que j'ai la chance de rencontrer ici, c'est l'histoire universelle de l'artiste. Celui qui coûte que coûte ne lâche pas ce en quoi il croit et qui finit par imposer sa vision quand quelques minutes avant personne n'aurait pu imaginer cela possible. Je ne parle pas là de vouloir être original ! Etre original n'est pas une préoccupation artistique ! Je parle ici de l'honnêteté ! De l'honnêteté d'un homme qui sait que pour dire ce qu'il a à dire, ce qu'il a, ce qui existe ne suffit pas, ne marche pas. Il voudrait, il essaye, de toute son âme. Mais ce qu'il a en lui le pousse et il ne peut faire autrement que de l'écouter.

Au fil des pages qui naissent sous ma plume, je me rends compte combien ce père, le père de Zeami est un réel et immense artiste. Un homme d'une grande noblesse d'esprit et de coeur. Et qui a la tête de 31 personnes a quand même pris le risque de tout perdre, de se tromper, de subir l'échec. Il n'a pas cherché à étonner, non. Il n'a pas su faire avec ce qu'on lui offrait, c'est très différent !

Il a assumé de nourrir sa troupe d'un bol de millet par jour (on ne donnerait même pas ça à un animal), montrant l'exemple et ne cherchant jamais à jouir du privilège de son poste, il s'est infligé une discipline de fer, a résisté à tous ceux qui voyaient en lui un génie et qui le poussaient à profiter de ce qu'il avait déjà réussi à faire, jusqu'au jour où il a trouvé. Oui, trouvé ! Dans la pire musique d'époque, lui qui faisait du Sarugaku, des spectacles qu'on offrait aux dieux et qui, même s'ils ne payaient guère, étaient respectés, je disais, il a trouvé dans la musique Kuse faite par des parias, des prostituées, ce qu'il cherchait. Lui, le grand Maître Kanze est devenu l'élève de cette prostituée et a appris comme le ferait un enfant tout ce qu'il pouvait apprendre d'elle, la considérant comme son réel maître. Sous les critiques et les rires moqueurs, malgré les colères des membres de sa troupe, malgré les mises en garde de sa femme, malgré lui-même sûrement ! Et pendant des années, il a mis au point ce nouveau Sarugaku, se justifiant face à ces acteurs pour qu'ils acceptent d'essayer ce qu'ils leur proposaient, affrontant leur colère et leurs quolibets. Et au final, il a eu raison de tenir ferme. Il a mis au monde un art nouveau, passant d'oeuvre votive à l'oeuvre théâtrale, alui permettant d'écrire des intrigues, de créer des personnages aux âfres infernaux. Lui qui aurait pu être un maître respecté de Sarugaku et jouir d'une vie tranquille, lui qui a assumé d'être rabaissé par tous ceux qui l'entouraient, lui qui malgré les doutes a su embarquer trente en une personne sans les nourrir convenablement et en finissant par leur offrir un projet qu'ils jugeaient fou et sénile, lui ! Il est devenu le premier Maître de Sarugaku à obtenir du Shôgun d'alors le titre de Compagnon des Arts du Shôgun, le fameux titre "ami" pour devenir le célèbre Kan(Ze)Ami, père du Nô contemporain !

Avec une telle histoire à raconter... comprenez-vous que plus j'avance, plus je me rends compte de ce qu'il a fait, plus la route me semble escarpée et ambitieuse. Je voudrais... je voudrais arriver à ce que les jeunes d'aujourd'hui trouve en cet homme unique la force qu'il leur manque pour faire leur pas, l'exemplarité qu'il leur manque pour devenir adultes. Puissent les Dieux m'entendre et m'aider dans cette tâche titanesque.

J'ai les épaules tant nouées que je pense que cette soirée se finira dans un bain brûlant !

Bonne nuit à tous.

Oups... j'oubliais ! Il y a eu une bonne nouvelle aujourd'hui ! Ce week-end, je rencontre à Paris, Oriza Hirata, célèbre metteur en scène japonais qui travaille beaucoup avec la France pour lui parler du projet Kujoyama. Bonne nouvelle, non ?!