26 septembre 2009

Nozomi ending...

11h22.
Dans le train qui me ramènera à Tôkyô et à Narita, après un arrêt important à Shinagawa.
De Narita, l'avion, de l'avion le ciel, du ciel Paris Charles de Gaule, de l'Aéroport Charles de Gaule Aix-en-Provence TGV... et voilà la boucle sera bouclée.

Je dis communément “trois mois”, mais en fait il s'agit de deux mois et demi, soit 76 jours pour être exact. 76 jours : 3 shimai - danses du nô - appris, 3 utai - chants du nô, 2 morceaux de nôkan - flûte de nô, 2 komai - chants et danses du kyôgen, 18 nô vus dont 1 sans masque, 6 maibarashi - shimai, mais avec instruments et comprenant en général deux danses chantées et dansées + un passage de texte entre les deux, 18 shimai, 11 kyôgen, ai mangé quelques 148 sushis, bu 33 thés de cérémonie, passé 92 heures en seiza et 160 en semi-lotus, vu 58 temples, parcouru 540 kilomètres en vélo dans les rues de Kyôto, pris le train 17 fois pour parcourir quelques 7365 kilomètres sur le sol japonais, ai médité 25 heures, ai prié devant un autel shinto 96 fois, montant le nombre de mes frappes de main à 192, rencontré 6 personnes capitales pour la suite des événements et l'invisible 39 fois, subi l'intrusion d'un esprit 1 fois et tellement d'autres choses...

Qu'est ce que cela a changé ?

Je ne le sais pas, c'est beaucoup plus difficile à mesurer...

Le temps a changé, l'importance de ma réussite aussi, la valeur de tout ce qui passe sur cette terre, l'émotion que peut susciter la beauté, l'amour.

Est-ce que ça tiendra au retour en France ?

Je ne le sais pas, ce n'est pas encore, pas maintenant.

Maintenant défile le paysage de Kyôto à Tôkyô, plein d'arbres magnifiques, d'oiseaux dont nous ne savons même plus le nom. Maintenant, j'essaye de rester droit et de respirer. J'ai encore ce rendez-vous avec Mr Watanabe Moriaki.

Je pense à cette petite puce qui m'attend à l'autre bout du monde et qui a su faire sans moi pendant 76 jours qui s'ajoutent à tous les jours d'absence que j'ai eu avec elle, une femme que j'aime et à qui je n'ai jamais vraiment su le dire, le vivre, tant je suis encombré de ces vies passées, celles de mes parents, celles de nos ancêtres qui cohabitent à l'intérieur et attendent que nous réussissions à résoudre ce qu'ils n'ont su qu'entrevoir. J'ai la vie devant moi et le silence un peu mieux installé. Rendant mon coeur plus perméable à la rencontre, à la joie d'être là, aujourd'hui et de pouvoir vous parler comme je le fais.

05h00.
Dans un hall de gare où j'ai beau chercher, je ne vois aucun idéogramme. Ici tout est en romaji ! Je suis sur le sol français depuis une petite heure. Avec encore quelques autres devant moi pour atterrir. Ce qui est frappant ici, c'est le silence. Pas de clignotements multicolores et sonores qui surgissent de tous côtés, non. Même les gens ne parlent pas... Je regarde les panneaux d'affichage. Tous ces avions qui arrivent des quatre coins du monde. Qui sont-ils ceux qui sont dedans ? Ont-ils vécu des expériences bouleversantes ? Ramènent-ils de nouvelles idées, de nouveaux rêves, un peu de tolérance ? Dire que chaque jour des avions sillonnent le ciel du monde comme si cela était normal, simple, évident. Pour moi, cela semble presque plus surnaturel que de croiser un aigle tous les jours au centre d'une ville surchargée de sons et de pollution !

Je n'ai finalement que très peu écrit pendant ce mois de retraite. Mais, dès l'instant où je suis descendu de l'avion, j'ai senti avec une force décuplée la présence de tous ces êtres que j'ai poursuivi là-bas. Nous aurons notre monde caché derrière mon paravent de chair, fait de toutes les images que j'ai volé là-bas et de celles qui me viennent de plus loin. Et nous pourrons nous retrouver au bord de la Kamo, à regarder les hérons pêcher dans les herbes hautes pendant que j'écrirai... oui, moi j'écrirai.

2 commentaires:

  1. Quel beau voyage! Voyage du corps, des sens, de l'esprit, du temps... j'ai très envie d'être la petite souris (ou l'aigle?) qui t'accompagne, pour voir et ressentir tout ça.

    Merci pour ce blog, merci pour ce partage et à bientôt, j'espère, pour un partage d'expérience. Bises à toute la petite famille réunie.

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  2. Salut Alexandre, ici Amandine.
    C'est intéressant, vraiment très intéressant. Déjà, de t'avoir rencontré toi et Elise, je ne crois pas qu'il y ait de hasard. Nous nous ressemblons beaucoup, même si nous ne l'exprimons pas forcément de la même manière, j'en suis assez bluffée. Et puis, ton parcours me touche, tes prises de conscience, tes paroles d'avant scène tous en rond à se tenir la main, tout cela fait étrangement écho à mon présent et même si je ne sais pas vraiment pourquoi je t'en remercie. De m'avoir permis de vivre une partie d'Atsumori, de sortir de ma bulle imaginaire et de concrétiser mon chant ailleurs, merci pour cette occasion là, précieuse. Je vois des photos de la tombe d'Atsumori un peu plus bas, je lirai tes textes, vu le nombre conséquent j'ai de quoi m'occuper un moment....

    Bon vent à toi.

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